Un Inventaire, pourquoi, comment ?
L’Inventaire des patrimoines culturels de la commune de Rosans (Hautes-Alpes) est engagé depuis le mois de mai 2019 par le Parc naturel régional des Baronnies provençales, en coopération avec le Service de l’Inventaire général de la Région SUD-Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Cette étude fait suite aux précédentes opérations d’Inventaire menées sur la commune de Barret-de-Lioure (Drôme) en 2015-2016 et sur la nouvelle commune de Val-Buëch-Méouge
(Hautes-Alpes – anciennes communes d’Antonaves, Châteauneuf-de-Chabre et Ribiers) entre 2015 et 2018.
L’objectif de cet Inventaire est de recenser – de la manière la plus exhaustive possible – le patrimoine bâti présent sur le territoire communal. Le travail se déroule en quatre temps : repérage, sélection, rédaction, versement dans le portail régional.
La première phase, celle du repérage, s’accompagne d’une couverture photographique des édifices. Cette étape primordiale permet d’avoir une connaissance fine du bâti, grâce à la saisie de multiples champs d’observation : implantation dans le territoire, matériaux utilisés, formes et fonctions de l’architecture, datation et chronologie des constructions, environnement végétal, etc. Les édifices les plus intéressants sont ensuite sélectionnés, c’est-à-dire qu’ils sont étudiés dans le détail et documentés par des recherches en archives. C’est grâce à ces informations que sont rédigés et illustrés les dossiers d’Inventaire. Dossiers individuels pour les bâtiments et ensembles architecturaux sélectionnés ; dossiers collectifs qui synthétisent l’ensemble des données issues du repérage.
Enfin, ces dossiers sont versés et publiés sur le portail régional, interface numérique accessible sur internet destinée à la diffusion auprès des chercheurs et du grand public. Toutes ces données offrent une très bonne connaissance du patrimoine bâti de la commune. Elles éclairent aussi les évolutions historiques, sociales et économiques du territoire. Ce savoir est très utile aux communes pour les accompagner dans leurs démarches de gestion et de valorisation du patrimoine
Alexeï Laurent, chargé d’étude au Parc naturel régional des Baronnies provençales, est responsable du repérage et de l’étude de l’architecture rurale : maisons, fermes, bâtiments agricoles, petits édifices et constructions rurales, bourg et fortifications… Alexandre Vernin, chargé de mission au Parc des Baronnies provençales, s’occupe des recherches en archives et du patrimoine de l’administration publique (mairie, école). D’autres chercheurs du service régional étudient les édifices liés au patrimoine religieux (église, chapelle, temple), au patrimoine artisanal ou industriel (moulin, distillerie, etc.) ou thématique (harkis).
L’Inventaire à Rosans
En ce qui concerne l’architecture rurale, au terme d’une année et demi de travail dans le bourg de Rosans, sa périphérie proche, puis sur tout le reste du territoire communal, la phase de
repérage est désormais terminée. La sélection des bâtiments et ensembles architecturaux à étudier est en cours de validation. L’hiver 2020-2021 va donc être consacré à la rédaction des
dossiers d’Inventaire. Ainsi, l’étude de l’architecture rurale sur la commune de Rosans devrait être achevée au milieu du printemps 2021.
Alexeï Laurent tient à souligner le très bon accueil que lui ont fait les habitants pendant cette campagne de repérage, mais aussi leur intérêt pour le thème du patrimoine et leur implication
dans cette étude : bonne volonté à ouvrir leurs propriétés, mise à disposition d’archives privées, présence assidue aux différentes conférences et exposition proposées, etc.
Les formes urbaines du bourg (intra- et extra-muros) trouvent leurs origines à la fin du 14e s. (enceinte conservée), avec une densification de l’habitat pendant toute l’époque Moderne. Cependant, l’aspect actuel découle de mutations spatiales mise à l’oeuvre à la fin du 18e s. ou au début du 19e s. : abandon du centre et déplacement de l’habitat dans les faubourgs originellement agricoles – déclassement fiscal des maisons intra-muros, abandon et ruine de certains îlots vétustes – création de nouveaux faubourgs routiers (1er quart 19e s. ; 2ème moitié 19e s. ; début 20es.).
Hormis la fortification de l’agglomération, les deux tours à bossages (2ème moitié 13e s.) et le château (14e s. – 19e s.) sont des éléments majeurs de cette agglomération. Témoins les plus visibles du bâti seigneurial, ils sont accompagnés par d’autres constructions : four, maison châtelaine du Liotier, fermes dispersées de la Coste, de la Rose et de Baudon.
L’architecture des maisons présente de nombreuses caractéristiques des 16e et 17e s., qui sont parfois très bien conservées ou sinon remaniées dans les réaménagements postérieurs.
Les intérieurs – cheminée, enduits, couvrements, placard-niche, éventuellement escalier – datent plutôt du 19e s. et du début du 20e s., mais les structures de circulation sont souvent plus anciennes.
L’origine de la plupart des fermes remonte à l’époque Moderne, peut être à la fin du Moyen-âge pour quelques-unes. Toutefois, trois ou quatre fermes de la basse plaine sont des créations ex-nihilo de la seconde moitié du 19e s. A l’inverse, au moins la moitié des fermes de versants, situées sur des terroirs plus malcommodes et parfois ingrats, sont abandonnées et ruinées.
Les bâtiments agricoles dispersés sont la plupart du temps du type grange-étable. Mais les « cabanons » forment un ensemble particulier et distinct tout à fait remarquable. Sur près de 60 « cabanons » ayant existé sur le territoire communal, seule une petite moitié subsiste – parfois en mauvais état de conservation.
Contemporains des mutations urbaines du bourg (de la fin du 18e s. au début du 20e s.), ils illustrent un certain étalement de la population et une amplification de la dispersion du bâti. Enfin, des constructions en pierre sèche s’égrainent dans les zones de versants les plus éloignées. Ces constructions sont aujourd’hui toutes ruinées. Pour une part, il s’agit de cabanes agricoles, situées sur d’anciennes zones de cultures, qui ont pu être transformées en cabanes pastorales lors de l’abandon de la fonction agricole de ces espaces à la fin du 19e s. Pour le reste il
s’agit de bergeries installées – certaines au moins depuis le 18e s. – dans des secteurs de parcours extensif.
Placées sur l’actuelle limite communale entre Rosans et Verclause, et donc aux confins de la Drôme et des Hautes-Alpes, un ensemble de trois bornes seigneuriales a également été retrouvé.
Il s’agit de petits monolithes en pierre de taille de grès, fichés dans le sol. Deux d’entre elles présentent une face ornée d’armoiries sculptées. Le blason – quatre roses posées deux et deux – pourrait dériver de celui de la famille d’Alauzon, qui possédait la moitié de la seigneurie de Rosans au début de l’époque Moderne.
Ces bornes, qui paraissent dater du 16e s., présentent un intérêt tout particulier du fait de leur ancienneté et de la rareté de ce genre d’aménagement sur les Baronnies provençales.
Localisation du project
Rosans, France