Les Haut-lieux

Dans la succession des crêtes et des sommets dans les bleus de l’horizon, par rapport aux immensités des plateaux soustraits au regard quotidien depuis les fonds de vallées, dans le dédale des vallons, des gorges et des plis des Baronnies provençales, ou tout simplement par différence avec le paisible paysage de campagne provençale bordant les villages, certains lieux, certains passages, certains reliefs, certaines formes ou édifices se font remarquer, découpent des silhouettes pittoresques, impressionnent par leur stature, leur puissance, leur situation. D’une manière ou d’une autre, ce sont des « monuments » : naturels ou humains, minéraux, végétaux, ou construits, ils incarnent de manière visible la mémoire des lieux, ils frappent les sens et restent en mémoire du visiteur.

Un patrimoine remarquable

Le paysage n’est donc pas homogène, certains de ses patrimoines sont remarquables plus que d’autres, que ce soit par leur valeur historique ou scientifique particulière, la place qu’ils tiennent dans la culture locale ou dans les points de vues sur le paysage, le rôle de « vitrine » qu’ils peuvent tenir, concentrant et résumant le caractère du territoire tout entier.

Ces « hauts-lieux », qui méritent une attention particulière en matière de connaissance, de préservation ou de reconnaissance scientifique, culturelle et touristique, ne sont en général pas disséminés au hasard. Des logiques géographiques, inhérentes aux formes du territoire, ou historique, contrôlent et expliquent leur répartition dans le territoire. Ces fils conducteurs peuvent être des axes naturels (failles géologiques, gorges, rivières, anciens chemins, voies de transhumance), des critères religieux ou politiques hérités du passé, des logiques agraires ou pastorales (successions et réseaux d’édifices religieux, de châteaux, zones de pâtures, microclimats ou sols favorables à certaines cultures…). Souvent, tous ces critères s’entrelacent et concourent à réunir en des lieux précis des éléments singuliers.

Parmi ces fils conducteurs, les routes et anciens tracés de voyage sont un élément important dans les Baronnies provençales, pays cloisonné où se déplacer a toujours été « toute une histoire ». Deux axes notamment voient s’enchaîner et mettent en scène des chaînes de lieux et d’édifices remarquables. De Nyons à Serres, l’ancienne route de l’Espagne à l’Italie, ouverte au XIXe siècle à grands effort sur les traces de l’ancienne voie romaine et des chemins médiévaux, traversant de part en part la moitié nord des Baronnies provençales, permet, de l’ouest à l’est, de remonter les temps géologiques, en parcourant une alternance de cluses, de gorges (celles de l’Eygues notamment), de vastes bassins (Rosanais), rythmés par des villages, nichés ou perchés, les ruines de donjons, de monastères.

Dans la partie sud des Baronnies provençales, de Buis-les-Baronnies à Eyguians, l’ancienne « route des Princes d’Orange » permet de passer du bassin versant de l’Ouvèze à celui du Buëch, par la succession de hautes vallées, le long de routes plantées de tilleuls. Au coeur du parcours, le visiteur marquant la pause au col de Perty peut découvrir un des plus beaux panoramas des Alpes du sud, embrassant d’un regard l’horizon du Mont Ventoux jusqu’au Dévoluy et aux Écrins.

Paysages de gorges

Les lieux de passage naturels et les voies historiques constituant logiquement des lieux privilégiés pour arpenter et voir le territoire, ainsi que concentrant sur des espaces très réduits et des panoramas saisissant tout un pannel de patrimoines naturels sauvages ou historiques, le Parc, même encore seulement en projet, a donné la priorité à la connaissance et la valorisation des paysages si pittoresque que sont les gorges et leurs routes, bordées de falaises, entaillées dans la vigoureuse carapace de calcaire tithonique caractéristique des Baronnies provençales.

Deux des plus grandes et plus riches de ses gorges ont fait l’objet d’un premier programme d’étude et d’action : les gorges de l’Eygues à l’ouest dans la Drôme, entre Sahune et Saint May, et les gorges de la Méouge à l’est, dans les Hautes Alpes, entre Châteauneuf-de-Chabre et Barret-sur-Méouge. L’étude de la toponymie et de l’occupation ancienne des lieux par un historien, l’étude par un paysagiste recensant les édifices et points de vues, ainsi que les impacts des aménagements routiers modernes, un séminaire de spécialistes des cultures en terrasse, des premiers réaménagements patrimoniaux dans la Méouge, un projet d’association pour la reprise de la culture de l’olivier dans les gorges de l’Eygues, ont ainsi déjà été menés.

Des sites et monuments remarquables

Riches en patrimoines du quotidien, souvent attachés à l’activité agricole ou à l’histoire médiévale du territoire, les Baronnies provençales ont aussi des sites et des monuments remarquables reconnus au titre des monuments historiques (40 bâtiments sont inscrits ou classés) ou des sites (12 sites sont actuellement inscrits). D’autres, tout en n’étant pas protégés, méritent aussi l’attention.

Conscient de l’importance de ces patrimoines remarquables, le Parc des Baronnies provençales a proposé, dans sa Charte, un schéma de préservation et de valorisation des patrimoines bâtis, autour de deux orientations majeures et de sites emblématiques.

Le poids de l’histoire médiévale et du perchement de l’habitat dans ce territoire de montagne a abouti à la reconnaissance d’un certain nombre de sites perchés remarquables, comme le château de Cornillon-sur-l’Oule (Drôme), le château et le vieux village d’Arzeliers à Laragne-Montéglin (Hautes-Alpes), le vieux village de Béconne à la Roche-Saint-Secret-Béconne (Drôme), l’église et le vieux village de St-Cyrice à Etoile-Saint-Cyrice (Hautes-Alpes), la château de La Roche-sur-le-Buis (Drôme).

D’autres sites, compte tenu de la densité des patrimoines remarquables qu’on y trouve, ont été reconnus comme “sites à fort caractère patrimonial”. Il s’agit notamment de villes et bourgs anciens, comme les vieilles villes de Serres et d’Orpierre dans les Hautes-Alpes, ou de Nyons, de Buis-les-Baronnies, de Taulignan ou du village de Saint-Euphémie-sur-Ouvèze dans la Drôme. D’autres ont également été reconnus au regard de leur intérêt archéologique, comme le site de la Bâtie-Montsaléon (Hautes-Alpes, vestiges de Mons Seleucus, agglomération gallo-romaine à vocation religieuse) ou celui de l’abbaye de Clausonne au Saix (Hautes-Alpes).

Pour chacun de ces sites, le Parc s’engage, pendant la durée de la Charte, à accompagner les propriétaires, généralement publics, ou les associations chargées de leur animation, dans des actions destinées à mieux connaître, préserver, animer et valoriser ces patrimoines.

Patrimoines villageois et urbanisme

Si certains « hauts-lieux » sont particulièrement remarquables, il n’en reste pas moins que le paysage quotidien, le décor de l’habitation ou du travail de tous les jours, constitue dans les Baronnies provençales un cadre de vie de haute qualité, au caractère historique omniprésent et assez bien préservé. Dans la trame dense des villages, les formes urbaines héritées du passé contribuent beaucoup au caractère, aux usages, à l’agrément de la vie même dans pratiques les plus contemporaines. Les villages sont le résultat de l’histoire, loin d’être localisés au hasard, ils se sont souvent agrégés autour d’édifices particuliers (châteaux, églises), ont évolué au gré des besoins mais longtemps dans les limites de la topographie, dans celles de la gangue bâtie de leurs remparts, à la croisée des chemins qui structurent leur ancien terroir, au coeur duquel le village ne saurait être compris sans lui.

Les Baronnies provençales ont toujours été densément occupé depuis la préhistoire, mais c’est la féodalité en particulier qui a profondément marqué ses villages, ses bourgs et ses villes. Les familles qui dominent alors la région, les Mévouillon, les Montauban et leurs alliés, organisent un réseau cohérent de châteaux et de villages fortifiés. Elles unifient ce territoire qui garde encore la mémoire de ces seigneurs, élevés au rang de barons. Il résulte de cette histoire féodale et militaire un héritage patrimonial qui contribue à l’identité des Baronnies provençales : le moindre village conserve les restes de son château, d’une église romane, de fortifications, mais aussi de patrimoines qui montrent le patient travail, au cours des siècles, de ses habitants pour valoriser, dans sa totalité, un terroir de moyennes montagnes sèches. Terrasses, cabanons, bergeries d’altitudes permettent de constater que ce territoire a été constamment valorisé, depuis les vallées jusqu’aux pâturages d’altitude.

Aujourd’hui, depuis quelques décennies, avec la mutation voir la fin de la société rurale, avec l’avènement d’autres logiques économiques, de celle fondé sur les déplacements en voiture, avec la standardisation de l’habitat, les lieux de vie ont, ou commencent pour certains, à changer de visage. Les structures anciennes se dispersent, l’urbanisation moderne vient parfois se poser en totale contradiction avec les logiques d’implantation héritées de l’histoire, au risque de nuire au caractère du pays, pourtant si précieux aux yeux des habitants et pour l’activité touristique.

Face aux mutations des villages et de l’urbanisme, le Parc a choisi d’accompagner élus et habitants pour leur permettre de disposer d’outils et de connaissances susceptibles d’innover tout en respectant le caractère du territoire.

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