Des risques naturels observés à la loupe

Situé à la fois sur un bassin alpin et méditerranéen, le Parc naturel régional des Baronnies provençales accueille des reliefs aux pentes raides et un climat qui, s’il plaît aux touristes, présente malgré tous ses avantages des contraintes qu’il est bon de connaître pour épargner les habitants et les acteurs économiques de potentielles catastrophes naturelles. Si les deux phénomènes que sont les feux de forêts et les chutes de blocs ne semblent pas liés a priori, le Parc accueille deux programmes de recherche sur ces risques dont les arbres et les forêts sont le dénominateur commun. Explications.

Depuis plusieurs années, le Parc travaille sur la question de la Gestion Intégrée des Risques Naturels (GIRN). Deux programmes de recherches nommés VULTER BARONNIES et VERTICAL permettent depuis trois ans d’évaluer la vulnérabilité du territoire du parc, l’un face aux feux de forêts et l’autre face aux chutes de blocs. Ces recherches ont permis à plusieurs stagiaires de master et doctorants des Universités d’Aix-Marseille et de Grenoble de débuter leur carrière de chercheur en s’appropriant ces thématiques de recherche en se focalisant sur les zones du parc où des vies humaines, l’environnement ou le patrimoine pouvaient être impactés.

Du côté du programme VULTER BARONNIES dirigé par l’Institut National de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAe) d’Aix en Provence, les scientifiques ont cherché à évaluer la résilience des territoires face aux incendies de forêt en travaillant d’une part sur les écosystèmes directement impactés par le changement climatique, c’est à dire la capacité des essences forestières à s’adapter à de nouvelles conditions climatiques, ou encore leur aptitude à renaître de leurs cendres pour les espèces se régénérant après le feu comme le pin d’Alep. Peu présent sur les hauteurs du parc, il pourrait trouver ici un terrain d’épanouissement et remplacer à terme le Pin sylvestre, du fait de sa meilleure résilience à la récurrence des feux. Jessica Jarjaye, gestionnaire forestier dans les Baronnies provençales, prend volontiers ces données en compte afin de conseiller au mieux les propriétaires des forêts qu’elle accompagne pour y planter des essences résilientes et robustes. Elle expérimente ainsi de plus en plus le Pin d’Alep sur des territoires nouveaux, et cherche à en valoriser le bois et les essences pour permettre à terme de trouver une économie pour ces nouvelles forêts.

D’autre part, il apparaît clairement que l’évolution de nos modes de vie (plus urbaines, et donc moins rurales) favorisent la densité des feux. La baisse de la pratique pastorale et le grignotage des zones agricoles par les zones naturelles est un élément qu’il a fallu prendre en compte dans cette étude. La végétation s’est ainsi densifiée pouvant rendre favorable la propagation des feux, parallèlement à une augmentation des ignitions due à la densification des interfaces habitat-forêt dans certaines zones. Le programme s’est également attaché à évaluer l’évolution dans le temps de la vulnérabilité du territoire des Baronnies provençales, en prenant en compte celle des différents enjeux du territoire, notamment celle des bâtis en interface. Pour permettre de mieux connaître ce type d’aléas et les enjeux du territoire, l’INRAe a conçu le prototype d’une plateforme en ligne qui permettra aux utilisateurs d’auto-évaluer la vulnérabilité des territoires face à ce risque en proposant une cartographie intelligente et avisée.

Concernant le programme VERTICAL mené par l’INRAe de Grenoble, il a visé notamment à produire la première cartographie exhaustive des forêts à fonction de protection contre les chutes de blocs rocheux, à l’échelle du territoire du Parc. On a constaté que l’efficacité des diamètres des arbres en capacité de limiter la propagation des projectiles rocheux en fonction de la pente n’étaient pas nécessairement ceux les plus volumineux, les petits arbres s’avérant de bons protecteurs pour les enjeux qui se trouvent sous ces zones à risques. En conséquence, le développement d’un sylviculture pare-risques rocheux peut s’avérer contradictoire avec celle relative à la prévention des incendies de forêts. Une des actions du  projet VERICAL a donc été d’évaluer  les conséquences du risques d’incendie de forêt sur le service de protection pare-risques rocheux des écosystèmes forestiers.  Les principaux livrables sont la cartographie des forêts à fonction de protection du risque rocheux et une proposition de plan d’action pour valoriser ce service rendu par le patrimoine forestier, pour la totalité du territoire du Parc. Les différentes cartes produites ont été transmises au Parc.

Ces données, couplées à celles du programme VULTER BARONNIES permettent d’entrevoir que la cartographie actuelle des forêts à rôle de protection va évoluer dans le temps dans un contexte de changement climatique. Outil propice à la protection naturelle, la forêt demande à être observée et étudiée, même sur les terrains les plus difficiles d’accès. Plantée d’arbres non-résilients, elle pourrait malheureusement devenir le théâtre d’accidents plus nombreux. Les chercheurs, qui ont également analysé la santé des forêts du Parc, font le constat que ce milieu n’est actuellement pas au meilleur de sa forme. Après avoir subi des épisodes de fortes sècheresse, les arbres en ressortent affaiblis. Et beaucoup d’individus, s’ils tiennent encore debout, n’ont en réalité pas survécu.

En parallèle à ces deux projets, le projet européen interrégional Espace Alpin ALPTREES a pour objectif d’étudier la distribution des espèces d’arbres en relation avec les changements climatiques. Une attention particulière est portée sur les espèces non natives  qui peuvent offir un réservoir d’essences au regard des conséquences des changements climatiques a moyen et long termes  sur la couverture forestière.

Tous ces éléments scientifiques seront dévoilés en janvier 2022 aux élus et aux professionnels concernés dans le cadre d’une journée de restitution par les responsables scientifiques de ces programmes de recherche-action. Ces informations permettront d’envisager les forêts et les risques naturels avec une vision tournée vers l’avenir. A cette occasion la présentation d’un outil de science participative (pour l’aide à l’inventaire et localisation des essences d’arbres), permettant aux acteurs et usagers du territoire de participer activement en tant qu’observateur de leur territoire, sera faite.

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