D’ici et de là : Les paysans du coing

Depuis quelques mois, onze producteurs se sont réunis pour ouvrir un point de vente collectif à Rosans. C’est ensemble et dans la bonne humeur qu’ils réhabilitent un bâtiment communal tout en préparant sur leurs fermes les produits qui seront proposés à la vente. Heureusement, l’équipe compte quelques bons bricoleurs qui mettent volontiers du cœur à l’ouvrage. L’ouverture prévue le 1er juin ne laisse entrevoir que quelques précieuses heures de travail possibles au local qui portera le nom « Les Paysans du coing ».

Rien de tel qu’un chantier pour souder les membres d’une jeune équipe. Au programme en ce jour de printemps : atelier peinture dans les 50 m◊ du futur espace de vente des Paysans du coing. Le groupe électrogène tourne à tout rompre et il faut parler fort pour s’entendre ! Daniel l’apiculteur a préféré à l’enfumoir le pistolet à peinture aujourd’hui ! Malheureusement, la peinture n’est pas compatible avec la machine et Daniel prend cet aléa avec philosophie quand arrive Boris, le jeune maraîcher plein de fougue, aussitôt prêt à se retrousser les manches pour terminer la tâche au rouleau, plutôt que d’attendre un jour supplémentaire ! Boris, aime le travail en équipe et la coopération. Ce projet il y tient, tout comme il tient à ce que les décisions soient justement prises, et que chacun ait son mot à dire. L’écoute et l’entraide, c’est son lightmotiv. Aussi, avec quatre autres producteurs de Rosans, ils ont pris pour habitude de passer une journée par semaine à travailler en collectif, sur la ferme de l’un ou de l’autre, pour les grosses corvées ou les tâches qui nécessitent des bras plus ponctuels, mais bienvenus. Alors ce ne sont pas les quatre mètres sous plafond qui vont l’effrayer !

Dans ce qui servira de réserve et de chambre froide, chacun y va de ce qu’il sait de l’historique du projet. À l’origine des Paysans du coing, une belle poignée d’optimisme partagé. Mais aussi une mairie à l’écoute et qui a su faciliter la mise en route du projet : « Il vaut mieux s’implanter avec une volonté communale » affirme Didier, éleveur à Valdoule. Autour de la table, la mairie, mais aussi le Parc naturel régional des Baronnies provençales qui a permis de réaliser une étude de terrain recensant les terres disponibles à Rosans. Car si la boutique a pu se monter c’est aussi et surtout parce que des maraîchers ont pu s’y installer ces dernières années. En parallèle, l’installation des Paysans du coings fut aussi rendue possible grâce à la présence depuis plusieurs années à Rosans de l’association militante Terrro  (Territoire et Revitalisation Rurale en ROsanais) qui a pour mission d’encourager et de faciliter l’installation de jeunes paysans. Toutes ces étoiles alignées ont permis une mise en route rapide des travaux dans ce qui était il y a encore quelques semaines un local de stockage du matériel communal. La commune a notamment pris en charge l’assainissement du local, et l’installation électrique. Le compromis est profitable à tous, autant pour le village que pour les producteurs, et la location du local à l’association de producteurs permettra à la mairie de louer un nouvel espace de stockage ailleurs dans le village. La boucle est bouclée.

Au centre du local, on imagine la silhouette encore invisible de ce qui sera l’étal de légumes. Contre les murs, les bocaux des plats préparés par Didier, et les fioles d’huiles essentielles de Jean-Jacques. Les premiers mots qui leur viennent pour décrire leur projet sont les mêmes pour tous : ils ont la ferme intention de vendre leurs produits au plus près de chez eux. Située au bord de la D994, axe plutôt passant l’été, et à deux pas du parking qui surplombe le plan d’eau, la boutique sera un point de ravitaillement parfait pour les futurs vacanciers ou pour les Rosanais qui n’auront plus à faire les 10 kilomètres qui les séparent du premier magasin de producteurs. Dans le groupe, deux couples de maraîchers ont leurs cultures à quelques centaines de mètres de là, autrement dit, quand ce sera la fin des radis sur l’étal , il suffira à Boris et Aurélie de la Ferme de l’Arborel ou à Matthieu du Potager de Boudat de les cueillir et de les amener en boutique 10 minutes plus tard, frais à souhait.

50 kilomètres. C’est donc la distance maximale que se sont fixés les producteurs qui fourniront le magasin et tiendront eux-mêmes boutique. Il y aura bien un peu de dépôt-vente pour diversifier et permettre la vente de produits plus rares venus de plus loin, car incontournables ; l’un d’entre eux évoque les glaces fermières de Gap comme le Saint Graal… ! Mais pour le noyau dur des onze producteurs associés, leurs fermes se situent pour la majorité d’entre eux sur la commune même de Rosans, les autres sont à Valdoule, Bruis, L’Épine ou encore Puymeras pour le plus éloigné. Ainsi se côtoient dans ce projet les membres fondateurs dont Amélie la vigneronne, Daniel l’apiculteur, Aurélie, Boris et Mathieu, les maraîchers, Laurence, Jean-Jacques et Dominique les producteurs de plantes aromatiques, Marty, Flavie, Chantal, Didier, Helgue et Afid, les éleveurs et enfin Matthieu le brasseur. La diversité des produits qu’on y trouvera permettra aux Rosanais d’être quasiment autonomes : farine de petit épeautre, pois chiches, tisanes, huiles essentielles, bières, abricots, noix, prunes et bien d’autres fruits, viande ovine, bovine et porcine. La boutique réunira tout ce que le terroir offre dans sa diversité, les uns vivant dans la plaine, les autres plus en montagne, à l’image des paysages de notre région méditerranéenne et ici préalpine. Une belle dynamique est en train de se créer dans ce petit village de 480 habitants qui accueillera aussi dans quelques semaines, une boulangerie.

À la caisse, les producteurs se passeront le relais chaque jour pour assurer une vente sans marge autrement que le prix producteur. Malgré le temps qu’il faut à la ferme, c’est un moment que Didier affectionne, lui qui en est déjà à l’ouverture de sa troisième boutique de producteurs. Il dit de lui-même qu’il est le « sage » du groupe. Pas un gourou, mais plutôt un conseiller tranquille, celui qui a de l’expérience. À la ferme il aime travailler seul. Par contre, pour la vente, le collectif est pour lui essentiel. Certes les idées ne convergent pas toujours sur les pratiques agricoles, ou les méthodes adoptées par les uns ou les autres. Mais au final, c’est aussi cette diversité qui fait la richesse du groupe et sa force : « Une boutique, ça fédère, ça oblige à se connaître. Un à deux jours par mois, on vend ses propres produits, mais aussi ceux des autres. Cette façon de travailler ensemble évite les tensions. » Et pour s’assurer qu’aucune tension ne viendra ébranler la belle énergie qui se déploie à Rosans, le groupe a décidé de limiter à 15 les producteurs associés.

En attendant le 1er juin, jour de l’ouverture, et le 21 juin date à laquelle la boutique sera officiellement inaugurée, le groupe est en campagne… Une campagne de financement participatif qui leur permettra de financer le matériel nécessaire à l’aboutissement de la boutique dont une chambre froide, des vitrines pour le fromage et la viande, du matériel de bricolage, et bien sûr, objet ultime de la boutique : une caisse enregistreuse ! Le décompte est lancé, il ne reste plus que 11 jours pour participer à un projet de développement local, et se faire plaisir en découvrant des produits locaux par la même occasion !

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