À Montjoux, chez Jean-Marie et Claire Chastan, se joue un projet innovant et inédit autour des énergies renouvelables. C’est dans le hameau de Barjol qu’une ancienne stabulation servira de bâtiment pilote, marquant un tournant vers la nouvelle ère énergétique qui s’annonce, alliant le désamiantage au photovoltaïque. 660 m2 de toitures au creux de la vallée du Lez permettront d’ici quelques semaines une production d’électricité équivalente à la consommation d’une cinquantaine de foyers.
Les centrales villageoises sont des collectifs de citoyens organisés en sociétés coopératives. Ils se sont réunis autour d’un projet environnemental au sein duquel transition énergétique rime avec photovoltaïque. Depuis plusieurs années, 59 centrales villageoises ont vu le jour en France, et quatre sont très actives dans le Parc naturel régional des Baronnies provençales. Avec la complicité du Parc qui accompagne ce mouvement, une étude a pu être menée pendant deux ans sur le territoire, révélant la présence de quelques 1200 bâtiments agricoles, commerciaux ou artisanaux amiantés dont 800 pourraient accueillir des panneaux solaires. Constatant qu’il était souvent trop onéreux pour les propriétaires de transformer les toitures et de se débarrasser dans les règles de l’art de l’amiante, le Parc et les centrales villageoises ont eu l’idée d’envisager une approche plus globale des enjeux sous-tendus pour un nombre invraisemblable de bâtisses potentiellement concernées. L’idée est simple et part d’un calcul mathématique basique : et si la pose de panneaux photovoltaïques sur de grandes surfaces et leur rentabilité sur le long terme permettait de prendre en charge le coût de fabrication des panneaux photovoltaïques, la pose, mais aussi une partie du désamiantage des toitures investies ? Avec pour ambition de mener un projet reproductible, le diagnostic technique, juridique et réglementaire a permis d’imaginer un modèle qui aujourd’hui fonctionne.
La Région Auvergne-Rhône-Alpes qui a vu l’intérêt de ce chemin engagé vers la dépollution alliée aux questions de santé publique ainsi qu’aux énergies renouvelables, s’est emparée du sujet et a lancé un appel à projets permettant d’obtenir des subventions pouvant atteindre 250 000 € . Ainsi les propriétaires de ces toitures amiantées (hors particuliers et bâtiments publics de l’État, des départements et des métropoles) peuvent s’emparer de manière autonome du procédé pour peu que les conditions techniques soient réunies : le bâtiment visé doit présenter une structure suffisamment solide ou pouvant être renforcée pour supporter les panneaux, l’exposition doit être satisfaisante et permettre de récupérer assez d’énergie solaire afin d’assurer une rentabilité, et enfin, le raccordement au réseau doit être possible.
À Montjoux, le début des travaux approche. Claire Chastan, la propriétaire du bâtiment, est impatiente. Une fois les travaux terminés, l’ancienne stabulation accueillera un séchoir pour les plantes aromatiques qu’elle cultive. Si elle était réticente au départ, car l’investissement est important, elle a accepté grâce à la détermination qui s’est finalement déployée autour de l’immense grange construite en 1984. Voisins, élus, citoyens, sociétaires des Centrales Villageoises de la Lance, chacun a fait preuve de solidarité, et Christian Delebarre le Président de la société coopérative confirme : « c’est une histoire de personnes et de rencontres ». Dans 20 ans, Claire et Jean-Marie auront remboursé les travaux et la pose de la nouvelle toiture et pourront jouir de la vente de l’électricité propre qu’ils produiront, « s’assurant ainsi une retraite confortable » ajoute Christian.
Le projet invitera certainement d’autres territoires à se lancer dans l’aventure du solaire d’autant qu’il devient urgent de changer les toitures amiantées vieilles de 40 ans, qui se délitent telles de petites bombes à retardement. Dans le sud des Baronnies provençales, l’idée progresse également, et les cinq toitures qui avaient été repérées lors du diagnostic et l’étude des bâtiments amiantés du territoire n’attendent plus que la possibilité de raccordement au réseau électrique pour que le rêve devienne réalité.