Mieux faire connaître et reconnaître le gypse dans le Sisteronais-Buëch

 

Depuis le Moyen Age au moins, dans les Baronnies provençales, on exploite le gypse, qui permet, une fois cuit, d’obtenir du plâtre. Depuis quelques années, cette matière a été mise à l’honneur et le Parc naturel régional des Baronnies provençales s’est proposé de travailler sur cette thématique dans plusieurs directions : connaissance de la ressource et de son histoire, préservation des patrimoines qui y sont associés, sensibilisation et valorisation de cette histoire géologique et humaine.

Le Gypse, qu’es acquo ?

Le gypse est un sulfate de calcium hydraté (formule chimique : CaSO4·2H2O) qui s’est formé lors de l’évaporation d’eau dans des lagunes ou des lacs salés sous des climats semi-arides et à différentes périodes géologiques. Parfois, dans les couches les plus profondes, le gypse a perdu son eau de cristallisation. Il est alors appelé anhydrite.

Le gypse est une roche légère (densité : 2,317), légèrement soluble dans l’eau pure et peu dure. Elle peut être rayée par l’ongle. Elle a un indice de 2, dans l’échelle de Mohs, qui va de 1 (talc) à 10 (diamant).

Le gypse a pu cristalliser sous différentes formes, comme le gypse lamelleux (en lamelle), l’albâtre gypseux, le gypse fibreux, le gypse saccharoïde, la pierre à plâtre, le gypse lenticulaire (dont une des formes les plus connues est formée par le gypse en fer de lance ou les roses des sables).

Chauffé pendant une dizaine d’heures à 180°C environ, le gypse perd un atome et demi d’eau et devient du plâtre qui, broyé, peut être utilisé dans la construction ou, depuis le début du XIXe siècle, l’agriculture. En Provence, la présence d’oxydes de fer dans les gypses donne aux plâtres locaux une couleur rosée.

Une ressource des Baronnies provençales

Si le gypse est une roche présente sur l’ensemble des continents, elle est toutefois diversement répartie en France. Le plus grand gisement de gypse est situé dans le bassin parisien (60% des ressources en France) où se trouvent les carrières les plus importantes. Il s’agit d’un gypse formé au cours de l’ère tertiaire (lors de l’éocène il y a 65 millions d’années environ).

La Provence représente 12% de la production française. L’essentiel des dépôts orientaux ont été formés à l’ère secondaire, lors du Trias et sont remontés à la surface à l’occasion de mouvements tectoniques qui ont accompagnés à la formation des Pyrénées et des Alpes. A l’ouest de la Provence (dans le Vaucluse essentiellement), on trouve d’abord des dépôts de l’ère tertiaire (oligocène, il y a 30 millions d’années environ).

Dans les Baronnies provençales, l’essentiel des gisements de gypse se sont formés au moment du Trias, il y a environ 230 millions d’années. Ils sont remontés à la surface à l’occasion de la formation des Alpes et peuvent former de véritables montagnes de sels (appelées diapirs). Toutefois, dans le secteur de Montbrun-les-Bains, on a exploité un gypse qui s’est déposé au cours de l’ère tertiaire (oligocène).

Les gisements de gypse sont parfois associés à des filons de plomb argentifère, de baryte, de galène, (Condorcet/Les Pilles, Laragne-Montéglin/Lazer, Orpierre), mais aussi à des sources salées ou thermales.

Une ressource exploitée depuis longtemps

Les traces certaines les plus anciennes d’exploitation du gypse dans les Baronnies provençales remontent au Moyen Age, comme l’attestent la mention de fours à chaux et à plâtre aux Pilles et à Condorcet (1304) ou d’une « gipière » (autrement dit d’une carrière de gypse) dans le cartulaire de l’abbaye de Bertaud à Ventavon (1386). Nombre de villages médiévaux apparaissent ainsi associés à l’exploitation du gypse, à commencer par Lazer, Arzeliers, Propiac, Montaulieu, Orpierre, Montrond, etc.

Les mentions sont plus fréquentes à partir du XVIe siècle : l’exploitation est alors menée par des agriculteurs qui, une partie de l’année, travaillent aux carrières ou aux mines. A proximité des gisements, des fours étaient construits. Les plâtres étaient vendus à une vingtaine de kilomètres à l’entour.

A partir du début du XIXe siècle, l’exploitation du gypse devient plus importante, notamment du fait des usages agricoles du plâtre (utilisé comme amendement des sols trop argileux) et du développement des moyens de transport. A l’est des Baronnies provençales, dans les environs de Laragne, des fours à plâtre, plutôt artisanaux, se multiplient à partir de l’exploitation du diapir de Lazer. A l’ouest, l’exploitation devient plus industrielle avec l’installation aux Pilles et à Condorcet, en 1838, de Paul Tramier de la Boissière (1799-1860), gérant de la Société plâtrière du midi, qui exploitait aussi des carrières dans le Vaucluse (Velleron) et à Marseille.

L’actuelle carrière de Lazer, propriété de la société Placoplatre, filiale de Saint-Gobain, est le dernier témoin de cette exploitation multiséculaire. Le gypse de Lazer est acheminé à l’usine de Chambéry qui fournit tout le sud-est de la France, la Suisse et l’Italie en plaques de plâtre, en doublages thermiques, en cloisons alvéolaires et en dalles de plafond.

Une matière qui a laissé des traces

L’existence de nombreuses sources salées ou soufrées atteste de la présence de gypse en sous-sol. Les sources soufrées ont été exploitées depuis le XIXe siècle, comme à Montbrun-les-Bains, à Condorcet ou Propiac où des établissements thermaux furent créés, mais des sources plus modestes servaient aux habitants du pays comme à Laborel ou Laragne. Dans d’autres secteurs, l’existence de diapirs est également attestée par la présence de fontaines salées (Saléon, Laragne, Savournon, Méreuil, Le Bersac, Propiac).

Le plâtre a été utilisé dans les constructions, comme mortier et comme enduit intérieur et extérieur, à l’instar des maisons ruinées du vieux village d’Arzeliers (commune de Laragne-Montéglin). Des maisons et châteaux, à Serres, Laragne, Orpierre ou Montmorin, illustrent l’usage du plâtre en façade ou en décor intérieur dans les maisons patriciennes.

Depuis 2007, le symposium de sculpture sur gypse et plâtre de Laragne, organisé avec le soutien de la Fondation Placo et de la Mairie de Laragne-Montéglin, par l’association « Gyp art et matière » et le Parc naturel régional des Baronnies provençales (pour l’édition 2017), montre que le gypse et la plâtre ont aussi une dimension culturelle et artistique.

Un programme d’actions pour faire mieux connaître et reconnaître le gypse dans le Sisteronais-Buëch

Le Parc naturel régional des Baronnies provençales, en partenariat avec l’association « Gyp art et matière » et avec le soutien financier de l’Europe (FEADER), du Pays Sisteronais-Buëch, de la Communauté de communes du Sisteronais-Buëch, de la Fondation Placo et de la société Placoplatre, des communes de Laragne-Montéglin et de Serres, a engagé en 2017-2018, plusieurs actions, destinées à illustrer, à présenter et à valoriser le gypse dans toutes ses dimensions :

  • Le gypse comme ressource et patrimoine dans le cadre de travaux de recherche menés par le chargé de mission « patrimoines culturels et culture » du Parc naturel régional des Baronnies provençales, destinés à produire une base de données rassemblant les renseignements concernant le gypse sur le territoire du Parc (gisements exploités, carrières, vestiges bâtis liés à l’exploitation, patrimoines bâtis, gypseries, etc.).
  • le gypse comme patrimoine grâce à la préservation d’une maison du vieux village d’Arzeliers qui utilise le gypse comme mortier. Cette restauration est menée dans le cadre de deux chantiers ouverts aux artisans professionnels, afin qu’ils maitrisent les techniques de construction liées au plâtre, apprises dans le cadre de formations professionnelles dispensées par ailleurs. La restauration de cette maison continue de faire l’objet de chantiers avec l’association « villages des jeunes » ou de chantiers d’insertion.
  • Le gypse comme valeur culturelle et d’échange par l’organisation du 7e symposium de sculpture sur gypse et plâtre à Laragne-Montéglin (21-27 août 2017), ainsi que d’un colloque sur le gypse contemporain les 13 et 14 septembre 2018 à Serres et d’animations dans des centres de loisirs et MJC.
  • Des temps de sensibilisation et d’information sur la géologie du gypse, sur ses usages dans la construction et la restauration de bâtiments auprès de tous les publics.

A l’issue du programme financé dans le cadre du Leader Sisteronais-Buëch, la Parc Naturel Régional continue ses actions dans le domaine de la sensibilisation et de la connaissance (conférences, balades), ainsi que de la préservation des patrimoines liés au gypse, à commencer par le vieux village d’Arzeliers, en lien avec la commune de Laragne-Montéglin.

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