Le tilleul, un arbre à admirer au fil des routes

Le tilleul, tout le monde croit le connaître. C’est un arbre commun, qu’on retrouve dans les cours de ferme ou aux abords des maisons. Et pourtant, dans les Baronnies provençales, on a su le reconnaître et le nommer pour de multiples usages.

Il y a bien sûr la tisane de fleurs de tilleul, qu’il vaut mieux consommer tiède pour exalter ses vertus apaisantes. Dans les Baronnies provençales, on distingue plus d’une quarantaine de variétés, patiemment recensées et décrites depuis trois ans par Jeanne Robert, ethnologue et Luc Garraud, botaniste au Conservatoire Botanique National Alpin de Gap-Charance.

Mais le tilleul ne prodigue pas seulement au visiteur que ses fleurs. Il contribue à l’aménagement de nos territoires du quotidien. Depuis le XVIIe siècle au moins, on sait que, grâce à leurs racines pivots, les tilleuls tiennent très bien les sols instables. Ne les trouve-t-on pas, à l’état sauvage, poussant sur des chaos de gros blocs, en contrebas des barres rocheuses situées aux ubacs de nos montagnes ? Ainsi, à Buis-les-Baronnies dans les années 1720, allait-on les chercher dans la montagne de Bluye, du côté du Mont Ventoux, pour les planter sur les berges instables des cours d’eau qui creusaient constamment les terrains limitrophes.

A partir des années 1850-1860, les agents voyers de l’Etat en font planter le long des « chemins vicinaux ordinaires », ancêtres de nos routes départementales. Ils remplacent progressivement les mûriers qui sont abandonnés à la suite de l’épidémie de pébrine qui met fin (temporairement) à la production de vers à soie dans nos campagnes. Les premières adjudications de fleurs de tilleul de bords de route se retrouvent dans les années 1880, à un moment où la demande de fleurs, pour la parfumerie en premier lieu, se développe. A partir de la fin du XIXe siècle, le tilleul est désormais l’arbre ami des bords de route qu’on va rechercher dans la montagne ou qu’on importe de quelque pépinière des environs.

Un siècle et demi plus tard, ils sont toujours là, ces tilleuls qui retiennent les chaussées. Ils ont dû composer avec la dent de la tronçonneuse car il faut, n’est-ce pas, laisser passer les camions et, leurs branches qui dispensent une ombre généreuse, deviennent alors gênantes. Ils doivent aussi se contorsionner pour laisser la place aux fils, électriques ou de télécommunication. Mais ils résistent.

Dans certains endroits des Baronnies provençales, on a su les respecter. Si vous voulez les voir majestueux, empruntez la route qui, du hameau de La Paillette rejoint Dieulefit. Si vous les voulez ensauvagés, empruntez la route du col de Perty depuis Montauban et vous retrouverez toute une tillaie naturelle, formée à partir de tilleuls de bords de route. Vers Eygaliers ou vers Sainte-Euphémie-sur-l’Ouvèze, vous les trouverez bien sagement alignés, attendant, en vain, d’être récoltés. En effet, avec le développement de la circulation automobile, et la pollution inhérente, leurs fleurs sont devenues impropres à la consommation. Mais elles dispensent toujours cette bonne odeur fleurie qui saisit les campagnes des Baronnies provençales, au cours du mois de juin.

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